Bruxelles, une ville populaire dont la richesse est artistique et culturelle :



Bruxelles est une ville dans laquelle j’ai l’habitude de me rendre régulièrement, jusqu’à deux fois par an. En tant que Tintinophile, j’ai un regard toujours très particulier sur chacun des quartiers que j’arpente. Je dois dire que la magie opère assez vite puisque je suis déjà prédisposé psychologiquement à ouvrir l’œil et à dénicher la moindre référence à Tintin ou à Hergé. Outre les boutiques nombreuses que sont les libraires ou encore les magasins d’occasions où l’on trouve bandes dessinées, livres et ouvrages anciens, différents lieux de cette ville rappellent Hergé et son œuvre. L’on peut évoquer d’abord et prioritairement le quartier d’Etterbeek dans lequel Hergé est né, sa maison de naissance porte une plaque en son nom, aujourd’hui brièvement cachée par un lierre qui rappelle celui qui orne le château de Moulinsart dans les bijoux de la Castafiore. Plus loin, se trouve la place de Theux sur laquelle trône fièrement le buste de Hergé, réalisé par le regretté Nat Neujean. Enfin, et toujours dans les parrages, le 34 rue de Theux est l’adresse depuis laquelle Hergé a réalisé les premières aventures de Tintin. Aujourd’hui encore, on y voit la petite lucarne de sa chambre où on l’imagine facilement plancher sur son travail de dessinateur.

Si l’on avance un peu dans la chronologie de Hergé, il me paraît très intéressant de se rendre à Schaerbeek, là où l'auteur a vécu avec sa première femme au début des années 1930, et là où il a rencontré l’altérité et l’ouverture au monde. En effet, le 24 rue Knapen et sa fameuse porte est aujourd’hui intacte et peut s’observer en toute quiétude, comme j’ai pu le faire récemment. Ce lieu est hautement symbolique, il traduit le tournant majeur et ô combien salutaire pour le dessinateur et donc pour la suite de son œuvre.

Revenons dans le cœur de Bruxelles et arrêtons-nous dans le quartier des Marolles. Ici, la dynamique artistique et populaire est très prégnante et ses nombreux cafés et terrasses lui offrent un véritable atout. On aime y faire une halte pour observer ce quartier vivre au rythme des échanges dans un bouillon artistique et populaire foisonnant. C’est d’ailleurs au cœur de ce quartier que la place du jeu de balles, chère à tous les Tintinophiles et collectionneurs, accueille son marché aux puces que l’on surnomme également « le vieux marché ». Commerçants, chineurs, touristes et locaux déambulent dans une ambiance festive, populaire et conviviale. S’y rendre pour boire un café accompagné d’un bouquin n’a pas de prix, selon moi.

Dans un autre registre, l’avenue Louise a vu naître les studios Hergé. C’est une grande avenue, inévitable lorsqu’on se promène à Bruxelles et qui se parcourt agréablement. Aujourd’hui, vous retrouverez au 162 avenue Louise la société « Tintinimaginatio » qui exploite les droits et les produits dérivés de Tintin. En plus des studios Hergé, l’on peut citer les locaux de la maison d'éditions du Lombard près de la gare de Bruxelles Midi où trônent encore aujourd’hui le visage de Tintin et la tête de Milou, en hommage au journal Tintin. En sortant de la gare (par exemple), la surprise de tomber nez à nez sur Tintin et Milou fait toujours son effet et permet d’esquisser ce léger sourire, comme pour dire que nous sommes en bonne compagnie. Toujours dans ce même registre, la boutique Tintin non loin de la Grand-Place est un immanquable.

Si vous prenez le métro, il faudra se rendre à la station Stockel couverte d’une fresque murale rendant hommage aux personnages de Hergé. Ce projet gigantesque était l’un des derniers de Hergé qui le réalisa en partie, avant d’être repris par son collaborateur Bob de Moor. La fresque est absolument magnifique, dessinée avec un talent remarquable et éclate aux yeux des voyageurs. Un incontournable pour les Tintinophiles mais aussi pour les simples curieux. D’autres fresques mettant à l’honneur des personnages de bandes dessinées (Quick et Flupke, Blake et Mortimer, Spirou …) sont à découvrir en arpentant la ville.

Outre l’univers de Hergé et de Tintin – parce que Bruxelles n’est pas que cela -  c’est une ville où la dimension royale s’incarne dans différents monuments historiques qui fascinent et qui interrogent. Le palais de justice est colossal au point de donner le vertige, il est en travaux pour encore quelques années. Cette dimension royale s’accompagne d’une véritable dynamique populaire où différentes communautés cohabitent. A ce titre, il faut souligner les nombreux slogans populaires et politiques qui jalonnent la ville et qui me font dire que les causes sociales et politiques vibrent et s’incarnent artistiquement. En effet, les affiches, les messages politiques, les stickers en hommage à la Palestine, en soutien aux communautés homosexuelles, en soutien aux victimes de violences policières ou encore, plus généralement, en soutien aux minorités d’où qu’elles soient, laissent à penser que Bruxelles reste très concerné par le sort des opprimés de ce monde. Cela est évidemment une bonne nouvelle dans un pays qui affiche parfois des divisions internes et qui a souvent clamé des positions de neutralité dans un monde désordonné. Bruxelles n’est pas neutre et s’engage pleinement dans des combats sociaux et politiques de défense des droits humains. Ainsi, l’on peut dire que Bruxelles dans un contexte monarchique vibre à l’aune des aspirations et des dynamiques populaires, dans des perspectives qui dépassent les frontières. Si l’on ne tombera pas dans une vision naïve, réductrice voire caricaturale, l’on peut se féliciter d’une ville qui bat au rythme des artistes populaires et dont le message porte la voix des sans voix.

Je n’ai pas la prétention de connaître cette ville sur le bout de doigts. Je ne suis qu’un voyageur de passage qui arrive avec un a priori positif et enjoué. Je ne vis pas à Bruxelles et donc je ne peux parler à la place de celles et ceux qui en éprouvent le quotidien et la réalité, je lis ici et là que c’est une ville qui se dégrade sur bien des aspects, tant sur le coût de la vie que sur la précarité que cela occasionne. Je ne connais pas la situation sociale des populations locales et je ne doute pas que les problèmes de logement, d’accès à l’emploi, aux services de santé existent et que la précarité économique et sociale est une réalité. Je ne perçois Bruxelles qu’à l’aune de mon statut de voyageur, statut qui renforce celui de privilégié qui peut se déplacer sans trop d’incertitudes et d’encombres.

Enfin, et pour conclure, Bruxelles m’attire pour son ambiance, sa culture artistique des galeries d'art aux artistes underground et son ouverture culturelle qui brasse un certain nombre de communautés. Parmi celles-ci, certaines rappellent l’importance de ne pas oublier ce qu’a été la Belgique dans son passé colonial. Ainsi, le Congo est lié à cette histoire et le devoir de mémoire ne s’apparente jamais à de la repentance mais au besoin de comprendre, de ne pas oublier et de relater une histoire complexe mais nécessaire. Il faut y voir également une richesse culturelle que l’on retrouve dans et à travers la bande dessinée, dans la proposition culinaire mais aussi dans l’offre pléthorique de bières très diverses et toujours très fortes (ce que j’aime particulièrement). Les ouvrages socio-historiques et socio-politiques sont nombreux, les librairies sont également très diversifiées et offrent aux lecteurs une gamme très importante de lectures. J’y ai souvent trouvé des livres que je n’ai pas forcément trouvés ailleurs. Je conseille également à chacun de se laisser tenter par un délicieux chocolat chaud, celui-ci est fait avec un véritable morceau de chocolat qui s’apprécie davantage au contact du lait avant de fondre dans la bouche. Rendez-vous à la place Flagey au Café Belga et vous m’en direz des nouvelles. La Grand-Place est une place toujours aussi impressionnante et à chaque fois l’émerveillement est intense. Certains y voient là la plus belle place du monde, c’est en tout cas celle qui a accueilli Tintin à deux reprises, elle a donc un cachet unique. Sachez qu'il est possible de s'y marier mais l'un des deux doit obligatoirement résider sur le territoire de Bruxelles.

Angèle chantait « Bruxelles, je t’aime », je ne peux en dire autant, mais je peux aisément dire qu'à Bruxelles, je m’y sens bien. Sans doute, ma Tintinophilie y est pour beaucoup mais je crois tout de même que n’importe quel voyageur peut vivre et ressentir une ambiance particulière, où les gens sont simples, avenants, accueillants et où il est possible de passer de très bons moments, rythmés par des festivités populaires et par des découvertes culturelles plurielles. Bruxelles est une capitale européenne qui se vit à taille humaine, il est par ailleurs possible de découvrir une bonne partie de la ville en marchant à pied. Alors, faites un tour dans une ville parfois décriée qui ne manque pourtant pas de légèreté et d’insouciance, qualités non négligeables dans un monde en proie aux passions tristes.

Et à la question : « D’où vient-il ce cabot ? », la réponse sera toujours : « De Bruxelles, pourquoi ? ».

Saïd Oner,


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