Le privilège blanc et sa nécessaire acceptation dans des perspectives universalistes  :

Le privilège blanc, de quoi parle t-on ?

L’on parle d’un groupe social qui tire des avantages sociaux par rapport à un autre groupe social. Il ne s’agit pas d’individualiser le blanc face à un autre, il ne s’agit pas de dire du blanc qui l’est coupable de sa couleur, cela n’a aucun sens. Cette interprétation est erronée car elle fait de la terminologie « privilège blanc » une lecture strictement individuelle, dépolitisée de son contenu éminemment sociologique et politique.

Ce n’est pas le blanc individualisé qui divise les communautés, c’est bien le privilège social. Et celui-ci existe indéniablement, c’est le fondement du racisme qui se déploie en hiérarchisant les groupes sociaux et raciaux. Si les races n’existent pas biologiquement, autrement dit s’il n’y a qu’une seule race humaine, il existe des races sociales. Le racisme est la manifestation de races sociales dans le champ social. Dans la manifestation de ces races sociales, certaines bénéficient de privilèges, d’autres de désavantages, c’est la définition même d’une domination. Une domination a pour vocation la division et la possibilité pour un groupe social d’en dominer un autre. Le racisme est une domination basée sur la race, l’on peut refuser le terme, mais il y a des populations discriminées et rejetées sur la base de la race sociale qui est la leur.

Le privilège blanc est donc d’abord un privilège social. Pourquoi l’appelle-t-on blanc ? Parce que dans la hiérarchie des races sociales, le blanc appartient à un groupe social qui bénéficie d’un privilège, celui de sa couleur. Il ne s’agit pas de dire que le blanc n’est pas dominé et qu’il ne subit pas d’oppressions, qu’il ne subit pas de discriminations. Bien au contraire. Une personne blanche en situation de handicap pourra être victime de discrimination sur le marché de l’emploi, par exemple. Mais la discrimination subie se fera sur la base de son handicap, non pas sur la base de sa couleur de peau.

La personne blanche peut donc être victime d’oppressions et de discriminations. Elle n’est pas exemptée de la domination économique qui s’abat sur elle. Une personne blanche peut subir la précarité, le rejet et de façon générale la violence économique.

Néanmoins, dans cette domination économique globalisée, cette même personne ne subira pas de racisme (en lien avec sa couleur de peau) dans une perspective d’emploi, de logement, d’accès à la santé ou à l’éducation. Tandis qu’une personne dont la couleur est autre pourra largement être discriminée à l’emploi, à l’embauche, à l’accès à la santé…

Et pourquoi dire tout cela ? Parce que même si la domination économique est globale et s’abat sur les populations dominées en général, il est important de prendre conscience des privilèges que peuvent bénéficier certains, même dans le cadre d’une domination globale.

En prenant conscience du privilège que l’on tire de son groupe social, on peut parvenir à déjouer les logiques de division. Le système économique dans lequel on vit à besoin de hiérarchiser les groupes humains et sociaux pour pérenniser sa domination, un système économique est dominant que lorsqu’il permet à des dominés de l’être un peu moins que d’autres. Et dans cette logique globale, le groupe social qui compose les personnes blanches bénéficie d’un privilège lui permettant l’accès aux institutions diverses et variées, au contraire d’autres groupes sociaux.

Ce groupe social a tout intérêt à s’en tenir à cela s’il est dans une perspective conservatrice : J’ai un job, j’ai accès à la santé, mes enfants peuvent faire des études supérieures. Que demande le peuple ? Après tout, le système économique dominant m’apprend à ne penser qu’à mes intérêts directs.

En attendant, le privilège dont je profite est la conséquence d’un racisme structurel. On peut l’accepter en tant que privilégié, moins en tant que désavantagés.

Les populations désavantagées dans une domination globale ne revendiquent que l’égalité en droits. Il est donc tout à fait recevable qu’elles évoquent ce privilège blanc, elles ont le droit d’avoir accès aux institutions et elles ont encore plus le droit de faire remarquer qu’elles subissent racisme et discriminations.

C’est au groupe social blanc d’accepter qu’il bénéficie d’une position avantageuse dans une domination globale. En l’acceptant et en prenant conscience de ce privilège, il peut s’inscrire dans des perspectives émancipatrices en créant de la solidarité avec les populations désavantagées. Il peut ainsi créer du rapport de force avec un pouvoir global dans une finalité émancipatrice, si tant est que sa volonté aille dans le sens de l’émancipation.

Pour conclure, le privilège blanc n’est donc pas une attaque de la part de populations désavantagées. C’est une lecture objective des rapports de domination dans lesquels nous vivons. C’est le système économique globalisant qui permet cette lecture là, ce ne sont pas des populations qui ont subitement décidé d’évoquer ce terme de privilège blanc. Derrière ce terme, il y a une réalité pratique, économique, sociale et politique.

Soit, on rejette ce terme et ses conséquences pratiques et, auquel cas, la domination capitaliste a encore de beaux jours devant elle, soit on l’accepte et on le comprend pour, non pas se défaire de ce que l’on est, mais pour faire avec ce que l’on a dans des perspectives égalitaires. C’est ça le véritable universalisme.

Saïd Oner,

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